Ce guide du prescripteur de Sevrelong s’adresse aux médecins prescripteurs de traitements agonnistes opiacés.

Certains contenus de ce guide évoquent des pratiques spécifiques du canton de Genève. Les médecins en dehors de Genève devront se référer aux conditions spécifiques de leur canton ou de leur pays.

Lectures préliminaires :

Règlement relatif à l’application de la loi fédérale sur les stupéfiants et les substances psychotropes (RaLStup). Législation genevoise – K 4 20.02 (Entrée en vigueur : 5 juillet 2007)

Directive sur la prise en charge médicamenteuse des personnes toxicodépendantes. Directive DGS.003 (Entrée en vigueur : 1 juillet 2013)

Recommandations médicales pour les traitements basés sur la substitution (TBS) de la dépendance aux opioïdes – 2012. Société Suisse de Médecine de l’Addiction

Praticien Addiction Suisse

Dépendance aux opioïdes – Traitements basés sur la substitution. Révision de juillet 2013 Office fédéral de la santé publique OFSP  

formes pharmaceutiques du Sevrelong

Le SROM (Sevrelong®) est un agoniste pur des récepteurs aux opioïdes avec une affinité prononcée pour les récepteurs de type µ et une affinité faible pour les récepteurs de type κ.

Capsules retard
(par os)

Traitement indiqué pour les personnes avec une addiction aux opiacès, spécialement pour celles qui présentent un prolongement du QTc o des effets secondaires génants de la méthadone.

Formes galéniques : Sevre-Long 30 mg, 60 mg, 120 mg et 200 mg.

Pharmacocinétique du Sevrelong

Absorption
Après administration orale, la morphine est rapidement absorbée et est soumise à un métabolisme de premier passage marqué (biodisponibilité après administration orale de 20 à 40%). Pas d’influence avec prise de nourriture.

Le système retard permet la libération contrôlée et retardée de la morphine (administration une fois par jour)

Distribution
Le volume de distribution de la morphine est de 3‑4 l/kg. La liaison aux protéines plasmatiques est d’environ 35%.

La morphine traverse la barrière placentaire et peut être retrouvée dans le lait maternel.

Métabolisme
La morphine est principalement métabolisée dans le foie par le gène UGT2B7 en morphine-3-glucuronide (M3G) (57%) et morphine-6-glucuronide (M6G) (10%). Les métabolites atteignent des concentrations plasmatiques supérieures à celle de la morphine (M3G/morphine: 34; M6G/morphine: 3,9). La formation de protéines plasmatiques de M3G et M6G est faible, respectivement 10% et 15%. M3G n’a pas d’action analgésique, M6G a une action deux fois plus puissante et deux fois plus longue que la morphine. M6G est principalement responsable de l’efficacité analgésique de la morphine.

Elimination
La demi-vie d’élimination de la morphine est de 2‑4 heures et la clairance plasmatique totale est de 15‑30 ml/min/kg. Elimination principalement renale sous forme de morphine-glucuronide. Environ 7 à 10% de la morphine administrée sont excrétés par la bile avec les fèces.

ATTENTION : 

Patients âgés
Métabolisme de la morphine peut être ralenti chez les patients âgés, ce qui entraîne des concentrations maximales plus élevées et des demi-vies plus longues 

Insuffisance hépatique
Les patients avec cirrhose hépatique montrent des modifications au niveau de la pharmacocinétique de la morphine : la demi-vie plasmatique de la morphine est prolongée (réduction de la glucurono-conjugaison et de la clairance). De même, le rapport M3G et M6G/morphine dans le plasma est abaissé, ce qui suggère une activité métabolique réduite.

Insuffisance rénale
L’AUC plasmatique est augmentée et la clairance est réduite. Par rapport aux personnes ayant une fonction rénale normale, les patients atteints d’insuffisance rénale sévère présentent également des concentrations plasmatiques significativement accrues de M3G et de M6G.

Action du Sevrelong

Action

1. Propriétés agonistes sur les récepteurs opioïdes

Analgésique
Anxiolytique
Antitussive
Antisevrage d’opiacés

2. Blocage de la sensation d’euphorie causée par les opioïdes à effet rapide en raison de la tolérance générée par la prise répétée.

Éffets sécondaires du Sevrelong

Constipation
Céphalées
Insomnie
Miosis
Sédation
Nausées
Fatigue
Vertiges
Eruption cutanée, prurit, urticaire
Sudations profuses
Hypotension artérielle
Dépression respiratoire, bronchospasme
Manque d’appétit
Abaissement du seuil épileptogène


DANGERS

Prise de benzodiazépines, alcool ou autres sédatifs
Une prise de substances qui ont un effet sédatif en parallèle au traitement de SROM peut accroître la sédation et induire une dépression respiratoire et des overdoses mortelles peuvent survenir beaucoup plus rapidement.

SURDOSAGE ET EFFETS TOXIQUES

Troubles de la conscience, coma, apnée, hypoxie sévère (ces effets indésirables peuvent en un deuxième temps entraîner une rhabdomyolyse traumatique, une parésie musculaire par compression de troncs nerveux, des lésions organiques par hypoxie), oedème pulmonaire, arrêt cardiaque, décès.

 

Une myosis marqué et une vessie pleine et tendue sont des signes pathognomoniques de surdosage.

 

Chez les sujets non accoutumés aux opiacés, la dose de DAM potentiellement mortelle se situe aux alentours de 30 mg par voie intraveineuse et de 100 mg par voie orale.

INTERACTIONS MÉDICAMENTEUSES

  • La prise additionnelle de substances sédatives (opioïdes, alcool, anesthésiants et de certains anti dépresseurs et neuroleptiques renforce les effets sédatifs sur le système nerveux central.
    Attention : dépression respiratoire, coma, conduite de véhicules et maniement de certaines machines.
  • Les inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO) et le SROM ne doivent pas être administrés simultanément. Le SROM est contre-indiqué durant les deux semaines qui suivent l’arrêt d’un IMAO.
  • La cimétidine et d’autres substances interagissant avec le métabolisme hépatique inhibent la transformation de la morphine, accroissant ainsi sa concentration plasmatique, et par conséquent son efficacité et sa durée d’action.

POSOLOGIE DU SEVRELONG

Les schémas posologiques proposés ci-dessous ont été dévéloppés en suivant les recommandations de l’Office fédéral de la santé publique (OFSP), de la Société Suisse de Médecine de l’Addiction (SSAM) et de Praticiens Addiction Suisse.

”TABLEAU

Ce tableau a été fait dans le but de faciliter les switch entre les différents TAO. Comme vous pouvez constater, le switch entre la DAM iv et la méthadone n’est pas linéaire. Les équivalences ont été prise du tableau proposé dans le Manuel de l’OFSP.

Vous trouverez les équivalences entre la DAM iv et la DAM po, c’est qui est assez simple car pour avoir le dosage de DAM po il faut multiplier la dose de DAM i.v. par 3.

1 mg de DAM i.v. correspond à 3 mg de DAM p.o.

Vous trouverez aussi l’équivalence entre la méthadone et le Sevre-long. Le facteur de conversion est bien connu : pour obtenir le dosage de Sevre-long il faut multiplier le dosage de méthadone par 6 – 8  (à exception des méthabolisateurs rapides de méthadone pour qui on doit multiplier par 4,5). Des précautions sont à prendre face à de méthabolisateurs rapides de méthadone qui souhaitent un passage de méthadone à DAM iv ou DAM po.

ASSUREZ-VOUS DE BIEN UTILISER LE DOSAGES PAR JOUR AVANT D’UTILISER CE TABLEAU.

 

SEVRELONG p.o.

INSTAURATION : GÉNÉRALITÉS SUR LE SEVRELONG

Avant toute instauration du traitement de Sevrelong, s’assurer que :

    • la personne présente des critères de dépendance
    • le résultat du test urinaire est positif pour les opiacés (recherche d’opiacés)
    • une recherche des intéractions médicamenteuses (consommation substances sédatives, IMAO, Cimétidine)
    • une recherche de signes d’insuffisance hépatique ou rénale

 

Lors de l’instauration du traitement, on commencera toujours avec de faibles doses.

 

INSTAURATION : J1

Dosage initiale : 200 mg
Dosage maximal le premier jour : 320 mg

–> Il est recommandé de commencer le traitement le matin afin d’apporter le meilleur confort possible dès le premier jour.

–> Si la personne présente de signes de manque 6h après la dose initial : Administration de 120 mg supplémentaires.

 

INSTAURATION : J2 jusqu'a stabilisation

Augmentation de max. 120 mg / jour selon la clinique (administration une seule fois par jour) jusqu’à atteindre une dose d’entretien située souvent entre 600 – 800 mg / jour

CONVERSION : SEVRELONG à MÉTHADONE

Attendre 24h après la dernière prise de SROM (Sevrelong).

Dose unique de SROM correspondant à 6-8 fois la dose de MTD (voir ci-dessus : tableau d’équivalences)

 

CONVERSION : MÉTHADONE à SEVRE-LONG

Attendre 24h après la dernière prise de MTD.

Dose unique de SROM correspondant à 6-8 fois la dose de MTD (voir ci-dessus : tableau d’équivalences)

ATTENTION : Si la personne est métabolisatrice rapide de méthadone (prise de MTD en deux fois) ou si nous avons une suspicion car le dosage de méthadone est très élevé (>120 mg / j), il faut être prudent dans la conversion et utiliser plutôt une équivalence à 4,5 fois la dose de MTD (et non 6-8 fois). La personne peut être métabolisatrice rapide de méthadone et ne pas l’être pour la morphine.

CONVERSION : SEVRELONG à BUPRENORPHINE

Attention: lorsque les doses quotidiennes de méthadone sont supérieures à 450 mg/j, il est très important de respecter les conditions suivantes, afin d’éviter l’apparition de symptômes de sevrage intempestifs.

Réduction progressive du Sevrelong jusqu’à 200 mg/j ou à des doses inférieures.

Arrêt du traitement de Sevrelong et attente des premiers signes de sevrage (si l’instauration de buprénorphine se fait trop tôt avant des signes de manque clairement identifiés, des symptômes de sevrage spectaculaires peuvent survenir).

La buprénorphine doit impérativement être administrée sous forme de comprimés sublinguaux (effet de premier passage).

INSTAURATION DE LA BUPRENORPHINE :

Dosage généreux du premier jour est absorbé de manière fractionnée :
Première prise 2 mg, puis jusqu’à trois à quatre fois 8 mg, soit 34 mg le premier jour

D’éventuels signes de sevrage peuvent être traités avec un agoniste des récepteurs alpha2-adrénergiques
(clonidine)

Dès le deuxième jour de traitement, le dosage ne dépasse en général pas 16 mg, même s’il était
significativement supérieur le premier jour.

CONVERSION : BUPRENORPHINE à SEVRELONG

Attendre 24h après la dernière prise de Buprénorphine (Subutex)
Introduire le Sevrelong comme mentionné dans le chapitre Instauration de ce même article.

CONVERSION : SEVRELONG à DAM I.V.

Cette conversion est souvent utilisée en début de traitement (si l’instauration se fait depuis un TAO déjà prescrit en avance) ou lors des retours de vacances.

1. Début du traitement DAM i.v. avec un traitement de sevrelong déjà instauré.

Un switch direct (arrêt du Sevrelong et début la DAM i.v. sans prolongement de la prescription de Sevrelong) s’avère souvent efficace, surtout si le patient souhaite utiliser la DAM po pour palier au syndrome de manque entre les prises de DAM iv. ce qui garanti le traitement avec une seule molécule.

Un autre accompagnement est possible en faisant un switch progressif, tel que proposé dans le Manuel de l’OFSP:

Le schéma est le même que pour les patients ne recevant aucun traitement de substitution préalable. Dans la mesure où la prise régulière de sevrelong est bien établie, la même dose de sevrelong peut être administrée le premier jour et répartie le cas échéant en deux prises, en tenant compte de la demande des patients. À partir du troisième jour, la dose de sevrelong peut être réduite de 60 mg tous les trois jours. La réduction de la dose peut être suspendue à tout moment et il est raisonnable dans certains cas de prescrire une éventuelle dose d’appoint de 60 mg.

Trouver le bon dosage de DAM i.v.

  1. Se référer au tableau de conversion (DAM po –> DAM iv –> MÉTHADONE –> SEVRE-LONG)
  2. Retrouver l’équivalence entre le Sevrelong et la DAM i.v.
  3. Le dosage de DAM i.v. proposé est le dosage par jour ! Il faut donc diviser par deux afin d’administrer le traitement deux fois par jour.
  4. Étant face à un nouveau patient, le chemin d’instauration de la DAM i.v. est à suivre :

15 mg DAM iv –> Attendre 30 minutes –> réévaluation ok (insuffisance resp? choc anaphylactique?) –>

a ) –> si pas de symptômes de surdosage et dosage de DAM i.v. < 200mg /plage , effectuer une administration supplémentaire avec le reste du traitement.

b ) –> si pas de symptômes de surdosage et dosage de DAM i.v. > 200mg/ plage, diviser le dosage restant en 2 et administrer le traitement en 2 prises supplémentaires avec une attente de 20 min entre les prises.

Des précautions sont à prendre face à de méthabolisateurs rapides de morphine qui souhaitent un passage de méthadone à DAM iv ou DAM po.

 

2. Retours de vacances

La dose finale est en général la même que celle qui était prescrite avant le départ du patient. Le surdosage accidentel est le risque essentiel de la transition.

En plus de l’anamnèse, il convient de s’assurer de l’état des patients (état de santé, imprégnation aux opiacés).

3 scenarios possibles :

1. Le Sevrelong leur a été remis et la prise, qui a eu lieu sous surveillance, est attestée (hôpital, prison, voyage avec un accompagnateur chargé du traitement, autre policlinique…)

Lorsque l’on passe à la DAM en injection, on court le risque d’une sédation excessive ou d’une réaction de type histaminique car le patient n’est plus accoutumé à l’afflux sanguin rapide de la substance. Il est donc nécessaire d’augmenter les doses par étapes. On peut accroître les doses au cours d’une même journée.

La première dose sera d’environ le tiers de la dose finale à atteindre sans toutefois dépasser 70 mg.

– Si le dosage finale de DAM i.v. < 200mg /plage, attendre 30 minutes, évaluer et effectuer une administration supplémentaire avec le reste du traitement 30 minutes plus tard.

– Si le dosage de DAM i.v. > 200mg/ plage, attendre 30 minutes, diviser le dosage restant en 2 et administrer le traitement en 2 prises supplémentaires, avec une attente de 20 min entre les deux dernières prises.

2. Ils ont reçu le Sevrelong à emporter et ils ont géré eux-mêmes leur traitement (vacances, lieu de travail éloigné…)

Dans cette situation, la tolérance aux opiacés doit être préalablement contrôlée.

On peut le faire en fractionnant la première dose, par exemple avec 15 mg.

Si la tolérance est avérée, on pratique la procédure 1, avec 2 ou 3 injections suplémentaires en fonction de la dose par plage.

Si la tolérance n’est pas avérée et que le patient présente des signes d’intoxication, on pratique la procédure ci-dessous (3.).

3. Ils n’ont pas reçu de sevrelong (vacances dans un pays n’autorisant pas son introduction, absence inopinée, absence de tolérence lors d’un retour de vacances ou lieu de travail éloigné…)

Dans le troisième cas, il est impératif de présumer qu’il n’y a plus de tolérance aux opiacés.

Il faut donc adapter la dose finale de la première journée à la baisse afin d’éviter des surdosages accidentaux. L’instauration de la posologie a lieu comme pour un nouvel arrivant ne recevant pas de traitement de substitution préalable, donc avec un dosage finale de 80 – 100 mg par jour.

L’accroissement de la posologie les jours suivants doit se limiter à max 50% de la dose de DAM du jour précedent.

CONVERSION : DAM I.V. à SEVRELONG

Se référer au tableau de conversions pour instaurer un dosage de Sevrelong.

Réadapter régulièrement les dosages chez les patients avec prescription de Sevrelong en réserve.  Si le patient avait déjà une prescription préalable de Sevrelong dans son dossier, il se peut que des changements dans des dosages de DAM aient eu lieu après la dernière modification. C’est donc important de penser aux réadaptations de TAO en réserve afin de garantir un meilleur confort.

En se basant sur le fait qu’à vitesse d’absorption et d’élimination normale, 900-1200 mg de Sevrelong entraînent une saturation quasi totale des récepteurs. De ce fait, si l’équivalence de DAM iv à Sevrelong est supérieur à 900 mg et qu’on n’est pas face à une personne connue pour un métabolisme rapide de la sevrelong, on devrait instaurer une dose initiale selon tableau mais diminuer par la suite les doses de sevrelong à un rythme d’environ 60mg/j.

La dose de sevrelong, établie sur base du traitement préalable, peut être augmentée jusqu’à un maximum de 900-1200 mg. En cas de traitement à doses élevées, il est préférable de passer au Sevrelong quelques jours avant le départ du patient. On peut ainsi prescrire une dose légèrement supérieure que l’on réduit de 60 mg par jour, ce qui rassure bien souvent le patient.

SEVRAGE

Diminution progressive en fonction de la clinique, souvent diminution de 10% par semaine ou toutes les deux semaines (à convenir avec le patient).

 

Informations importantes relatives à la perte de tolérance

Quand les patients diminuent leur traitement dans le cadre d’un sevrage, il est impératif de les informer du risque d’overdose en cas de consommation d’héroïne.

La dose d’héroïne ou de Sevre-Long à laquelle la personne est habituée auparavant est devenue potentiellement fatale.

Si lors du sevrage la personne trouve cela insupportable et/ou a des difficultés à rester abstinent, il est préférable d’augmenter à nouveau le dosage du médicament de façon progressive.