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Les planches de pharmacothérapie des addictions

Passage de la méthadone à la buprénorphine

Le passage d‘un traitement par méthadone à celui par buprénorphine peut s’imposer dans certains cas ; notamment en présence d’une prolongation de l’intervalle QT dans l’ECG, d’arythmies ventriculaires, en cas de symptômes de sevrage importants entre de fortes doses de méthadone ou en cas de troubles hormonaux. Malheureusement, pour certains patients, le processus de transfert peut signifier une période d’inconfort qui met à risque leur engagement dans les traitements. Aussi bien la réduction préparatoire éventuelle de la méthadone que l’introduction de la buprénorphine même peuvent déclencher des symptômes de sevrage qui augmentent le risque de drop-out du patient.

Certaines guidelines recommandent de réduire la dose de méthadone, si possible jusqu’à 30mg/jour pour faciliter le passage.

On commencera par l’arrêt de la méthadone et on attendra de symptômes de sevrage clairs.

Après la dernière dose de méthadone, on devra attendre habituellement 24 à 48 h , parfois jusqu’à 72 heures avant l’apparition de ces symptômes. Une évaluation à l’aide de l’échelle SOWS (Clinical Opiate Withdrawal Scale) pourra aider à objectiver les symptômes.

On attendra jusqu’à ce qu’un score d’au moins 12 soit atteint. Vous pouvez par ailleurs télécharger l’échelle. La clé d’une transition en douceur est ainsi moins la durée écoulée depuis la dernière dose de méthadone, que plutôt l’apparition d’un syndrome de sevrage bien objectivable.

À l’apparition des symptômes de sevrage, on pourra introduire la buprénorphine en débutant avec une dose de 2-4 mg. La dose sera plutôt de 2 mg si la dose de méthadone avait été plus de 40 mg.

Rappelons que la buprénorphine est un agoniste partiel, ce qui signifie qu’en présence d’un agoniste complet sur les récepteurs – et la méthadone en est un – elle agira comme antagoniste, et qu’elle a besoin de récepteurs libres d’autres opiacés pour agir elle-même comme agoniste.

Si après environ une heure après cette première prise de buprénoprhine les symptômes de sevrage ont diminué, ce sera le signe que la buprénorphine a trouvé des récepteurs libres et a pu agir comme agoniste. Une nouvelle dose de 2-4 mg peut alors être appliquée.

Si les symptômes ne sont pas améliorés, on attendra environ une heure et ainsi de suite. La dose maximale du premier jour sera de 8 mg, rarement plus.

Après l’induction et la titration, la dose de buprénorphine devrait être 8 mg ou plus par jour. Finalement, il peut être parfois utile d’adoucir les symptômes de sevrage après la première prise de buprénorphine par de la clonidien à raison de 100 μg toutes les 3–4 heures en contrôlant régulièrement la tension artérielle.

Prof Daniele Zullino
Service d’addictologie
Département de santé mentale et de psychiatrie
Hôpitaux Universitaires de Genève